Mon chien tire en laisse : par où commencer ?

Votre chien tire en laisse, vous avez mal aux bras, et vous vous demandez comment faire pour que ces balades deviennent enfin agréables ?

C'est l'un des problèmes les plus courants que je rencontre en clientèle. Et je vais vous dire quelque chose d'important : ce n'est pas le plus simple à résoudre. Ça demande de la régularité, de la patience, et surtout, il faut comprendre par où commencer.

Beaucoup de gens essaient de travailler directement en balade, et c'est pour ça que ça ne marche pas.

Chien qui tire en laisse : Marche en laisse vs marche au pied : une différence essentielle

Avant d'aller plus loin, clarifions quelque chose d'important. Quand je parle de marche en laisse ou en longe, je ne parle pas de marche au pied. La marche en laisse, c'est un chien qui ne tire pas, mais qui peut renifler, sentir à gauche, à droite, s'arrêter, explorer. C'est une balade normale, agréable pour lui et qui répond à ses besoins.

La marche au pied, c'est complètement différent. Le chien marche collé à côté de vous, se base sur votre rythme, n'a pas le droit de vous dépasser, n'a pas le droit de renifler. C'est un exercice qui peut être utile en balade sur de courtes durées, par exemple pour croiser quelqu'un ou passer un endroit délicat. Mais ce n'est absolument pas comme ça que le chien doit faire toute sa balade. C'est terrible pour lui, c'est très contraignant.

Donc quand on travaille la marche en laisse, on cherche juste à ce que votre chien reste connecté à vous, conscient de votre présence, et qu'il ne tire pas. Mais il garde sa liberté d'explorer dans le périmètre de la laisse ou de la longe.

La solution immédiate : le bon matériel

En attendant de travailler les compétences de base, il vous faut une solution immédiate pour que les balades restent gérables. Cette solution, c'est le harnais (en H ou en Y) avec une boucle à l'avant, au niveau du poitrail.

Tant qu'on n'est pas encore en situation réelle de travail, que votre chien tire, vous l'attachez à la boucle du devant. Ça limite mécaniquement la traction et ça n'entravera pas le conditionnement qui est en cours. Par contre, quand vous travaillez les exercices de proximité et de gestion émotionnelle, vous attachez la laisse à la boucle qui est sur le dos. Pourquoi ? Parce que c'est avec cette boucle-là qu'on veut qu'il apprenne à ne pas tirer. L'objectif à terme, c'est de pouvoir le balader uniquement avec la boucle sur le dos, parce qu'il aura compris qu'il ne doit pas tirer.

Le principe fondamental : ne pas travailler en situation directement

Voilà le secret que peu de gens imaginent. Si vous voulez un travail efficace, à long terme, sans monter la frustration du chien et de l'humain, il faut d'abord construire les compétences de base. Sinon, vous mettez simplement votre chien en situation d'échec.

Imaginez que vous vouliez apprendre à conduire sur l'autoroute. Vous ne commenceriez pas directement à 130 km/h, non ? Vous commenceriez dans un parking, puis une petite route, puis progressivement. C'est exactement pareil avec votre chien.

Les trois compétences fondamentales

Avant de travailler la laisse, votre chien doit maîtriser trois choses essentielles : la gestion émotionnelle, le désengagement et la proximité avec vous. Sans elles, il ne peut tout simplement pas réussir.

Compétence 1 : la gestion émotionnelle

La gestion émotionnelle, c'est la capacité de votre chien à rester calme et non insistant face à quelque chose qu'il veut. C'est un autocontrôle. Et ça se travaille avec des petits exercices simples, à la maison.

Voici un exercice classique.

Vous présentez une friandise dans votre main fermée.

Vous ne dites rien, vous ne bougez pas votre main.

Votre chien va essayer d'obtenir la friandise en interagissant avec votre main, en la léchant, en la poussant. C'est normal. Vous attendez simplement.

Dès que votre chien se calme et détourne le regard de votre main, vous dites votre marqueur (par exemple « oui ! ») et vous le récompensez avec une friandise venant de votre autre main.

Pourquoi récompenser avec l'autre main ? Parce que vous apprenez à votre chien que ne pas obtenir quelque chose n'est pas perdre. C'est même gagner davantage. C'est une fondation vraiment importante.

Compétence 2 : le désengagement

Le désengagement, c'est presque l'étape 2 de la gestion émotionnelle. C'est la capacité de votre chien à laisser les distractions, à se détourner de quelque chose d'intéressant. C'est cette compétence qui va lui permettre, en balade, de ne pas foncer vers tout ce qui l'attire.

Vous commencez à travailler le désengagement avec l'exercice de la main fermée. Quand votre chien détourne le regard de votre main pour obtenir la récompense, il apprend déjà à se désengager. Vous pouvez ensuite progresser avec des distractions plus importantes, toujours en récompensant quand il choisit de se détourner plutôt que de rester fixé sur la distraction.

Compétence 3 : la proximité avec son humain

La proximité, c'est simplement le fait que votre chien comprenne qu'il y ait une très grande valeur à rester connecté à vous, à s'intéresser à vous. C'est naturel pour un chien de vouloir explorer, de vouloir aller vers ce qui l'attire. Il n'y a pas d'intérêt naturel à rester près de vous. À nous de le créer.

Et comment on le crée ? Avec des petits jeux ludiques qui vont lui faire comprendre que plus il est proche de vous, plus il est concentré sur vous, plus il est gagnant. Des jeux comme toucher votre main, le jeu du pendule, le jeu du Petit Poucet, marcher près de vous, faire le pont. L'idée c'est que ce soit rigolo, que ce soit un jeu, et que de lui-même finisse par se dire : ok, plus je suis intéressé à mon humain, plus je suis proche de lui, plus je suis gagnant.

Voici un exercice très simple pour commencer. À la maison, donnez quelques friandises à votre chien pour le mettre en mode « récompense ». Puis faites quelques pas en arrière.

Il vous suit ? Dites votre marqueur et récompensez-le.

Refaites un pas en arrière. Il vous suit ? Marqueur plus récompense.

Quand il comprend bien, variez : un pas sur le côté, puis tournez. À chaque fois qu'il vous suit, vous récompensez.

Vous pouvez aussi faire cet exercice au moment du repas avec le contenu de la gamelle. L'idée est simple : récompenser à chaque fois que le chien vous suit et en faire quelque chose de rigolo. Votre chien comprend progressivement que vous suivre, c'est cool, c'est gagnant.

Progresser graduellement, en respectant le rythme

Une fois que ces exercices sont bien acquis à l'intérieur, vous commencez à les faire dehors. D'abord en extérieur calme, puis progressivement en extérieur plus stimulant. Et vous respectez toujours le rythme de votre chien.

Si c'est trop difficile, vous revenez à l'étape précédente. C'est normal, c'est même prévu.

En parallèle, vous travaillez le fait de sortir calmement.

C'est exactement comme l'exercice de proximité, mais l'idée c'est de réussir à passer la porte dans le calme. Vous commencez en retour de balade, quand le chien est déjà dépensé.

L'idée n'est pas de franchir la porte tout de suite, vous travaillez d'abord en intérieur avec la porte ouverte. Quand c'est bien acquis, quand vous arrivez à ressortir de la maison dans le calme, vous le faites en début de balade.

Votre chien comprend que sortir calmement et rester connecté à vous, c'est gagnant.

Combler les besoins fondamentaux

Voici un point clé à retenir, et c'est vraiment important : si les besoins fondamentaux de votre chien ne sont pas comblés, vous pourrez faire tous les exercices que vous voulez, ça ne fonctionnera pas.

Votre chien a besoin de se dépenser, de sentir, d'explorer, de jouer...

Si vous faites une balade de 20 minutes avec un chien qui a besoin de deux heures d'activité, il va tirer. Parce qu'il a de l'énergie à évacuer.

Donc avant de commencer le travail de proximité et de gestion émotionnelle, assurez-vous que votre chien a vraiment la possibilité de se dépenser. Que ce soit par du jeu, du sport, de la stimulation mentale, ou simplement une balade plus longue dans un endroit où il peut explorer et sentir.

C'est la base de tout.

Maintenant, travailler en situation

Ok, maintenant que vous avez mis toutes ces bases-là, vous pouvez commencer à travailler en situation de balade. Et là, c'est presque magique : il y aura presque plus rien à faire.

Simplement, ne pas renforcer quand le chien tire en laisse. Par exemple, s'arrêter et récompenser quand il ne tire pas, sans attendre qu'il se mette à tirer. C'est tout. Le reste suit naturellement.

Pourquoi ? Parce que votre chien a déjà compris que rester connecté à vous, c'est gagnant. Il a déjà les compétences pour gérer ses émotions et se désengager des distractions. Il a déjà envie de rester près de vous. Donc en balade, il va naturellement chercher à maintenir cette connexion.

Ce qui ne fonctionne pas

Avant de finir, je veux parler de ce que vous avez peut-être déjà essayé. Les coups secs sur la laisse, les colliers étrangleurs, les réprimandes. Ça peut paraître la solution puisque c'est ce qu'on utilisait uniquement il y a des années. Or aujourd'hui, les études ont prouvé que c'était quelque chose à fortement éviter.

Pourquoi ? Parce qu'on va utiliser la peur, la douleur. Ça va briser la relation. Et surtout, ça va amenuiser la capacité d'apprentissage de votre chien. Ça inhibe, mais ça n'apprend pas.

Vous avez fait exactement le contraire de ce qu'on cherche à créer : vous avez rendu le fait d'être connecté à vous moins sympathique.

Ça va à l'encontre de tout ce travail de proximité et de confiance. Et à long terme, ça empire les choses.

Une dernière chose importante

Je vais vous dire quelque chose d'important : ce travail demande du temps. Mais ça marche. J'ai vu des chiens qui tiraient comme des fous devenir des modèles de balade.

Et pendant ce temps, soyez bienveillant avec vous-même aussi. Vous allez oublier de récompenser, vous allez vous énerver, vous allez avoir envie d'abandonner. C'est humain. L'important, c'est de continuer.

Vos balades peuvent devenir agréables. Elles peuvent même devenir un moment de complicité avec votre chien. Ça demande du travail, de la patience, et de la bienveillance envers vous-même et votre chien. Mais ça en vaut vraiment la peine.